La Maison Près la Tour vendue 1 € symbolique : Quand le Partenariat Public Privé (PPP) est au service de la privatisation.
Pourquoi s’intéresser au dossier de la Maison Près la Tour (MPLT) ?
- La lésion à l’intérêt général ;
- Les atteintes aux droits garantis par la Constitution de par le refus d’appliquer la législation en matière de transparence administrative ;
- La violation de la loi sur les marchés publics ;
- La violation des prescrits du Code de la Démocratie Locale et de la Décentralisation (CDLD) ;
- La violation du principe de bonne Administration ;
- La désignation illégale du notaire chargé de l’estimation et de la vente ;
- La vente au profit de l’architecte Liègois Pascal DUMONT pour 1 euro symbolique qui fut annoncée dans la presse par Christophe COLLIGNON, alors échevin du patrimoine, 6 mois avant la prise de décision par le Conseil Communal, ;
- Les perquisitions du dossier à l’Hôtel de Ville et les liens avec l’affaire du Quadrilatère vendu 100 euros.
La Maison Près la Tour : joyau du patrimoine qui valait 1 €
La Maison Près la Tour est une des bâtisses les plus anciennes de la Ville de Huy. Vestige d’un passé Médiévale dont témoignent encore ses façades gothiques d’exception, elle constitue avec ses jardins un véritable joyaux du patrimoine public local. Rares sont les habitants à ne jamais s’être promenés dans le circuit-promenade qui reliait l’ancien couvent des frères mineurs à la ruelle de la Cloche en passant par les jardins publics.
C’est pour en préserver les qualités historiques et architecturales que l’immeuble et ses jardins furent classés. Loin d’être isolée dans le quartier, cette propriété est parfaitement intégrée dans un ensemble médiéval plus vaste qui fut classé sous forme de site et dont fait notamment partie l’ancien couvent des frères mineurs. Ce couvent, immeuble voisin remarquable héberge aujourd’hui le musée de la Ville de Huy. Le site classé, dont ces immeubles font partie, forme ainsi le cœur de ce bien commun que l’on nomme « le vieux Huy ». Jusqu’à ce que le politique décide il y a quelques années d’en interdire l’accès, les jardins publics permettaient à tous de traverser le vieux Huy en empruntant le circuit (Jardins-Ruelles Médiévales).
L’opération de privatisation pour 1 € symbolique
La décision du Conseil Communal Hutois
C’est pourtant à la surprise générale que le 10 novembre 2015, le Conseil Communal hutois pris la décision de vendre à prix symbolique et au profit d’un tiers privé : la Maison Près la Tour, les parcelles avoisinantes ainsi que les jardins publics.
Le montant de cette surprenante opération immobilière ? 1 Euro symbolique pour ce bâtit d’exception (B342t) et les parcelles (B339e & B343h), sans oublier 1 autre euro symbolique pour le canon de l’emphytéose portant sur les jardins publics(B340a). Au total de 2 euros pour 1 immeuble et 4 parcelles. Mais sur quels documents et sur quelles informations ont-ils basé cette décision ?
Le mythe du « chancre » pour justifier de la nécessité de vendre
Défendant personnellement le point en novembre 2015, Christophe COLLIGNON, échevin du Patrimoine de l’époque, justifiait de la soudaine et absolue nécessité de liquider ce joyau patrimonial en faisait état d’un soi-disant mauvais état du bâtiment qui, à le croire, mettait ce dernier en situation de péril. Une argumentation qui rappelait celle de la vente de l’immeuble du Quadrilatère pour 100 €.
Il a toujours été difficile de faire un lien logique entre les allégations de Christophe COLLIGNON et les photos prises en juillet 2015 qui attestent de l’état réel du bâtiment.
De surcroit, comment la Ville, durant plusieurs années, aurait-elle pu permettre l’occupation de cet immeuble par un artiste peintre Boris MESTCHERSKY et ses œuvres si l’immeuble présentait le moindre risque de stabilité ?
- Article de Vers l’Avenir du 04 février 2012 -Boris, artiste à la maison Près la Tour
- Article de Vers l’Avenir du 12 juin 2015 -Dans l’atelier de Boris, avant le Tour
Sans oublier que les propos tenus par Christophe COLLIGNON ont toujours été contradictoires avec ceux de la Ville de Huy elle-même, de Institut du Patrimoine Wallon (IPW) et du notaire chargé de l’estimation.
Le notaire : «l’état général du bâtiment a été préservé via une nouvelle toiture avec belle charpente…», étude des notaires Gérard & Gilmant (estimation);
La Ville de Huy & l’IPW : «ces travaux entamés en 1980 ont assuré la mise hors eaux et une bonne conservation du bâtiment …», «La charpente a été refaite dans les années 1980. Elle peut être conservée.», «Les façades sont en relativement bon état.», (appel à projet).
Enfin, à en croire Christophe COLLIGNON, la Ville de Huy n’avait en outre pas les moyens de restaurer cet immeuble classé dans lequel elle avait pourtant lourdement investi dans les années 1980. C’était sans compter la Régie Foncière.
Cette justification fut d’autant plus étrange qu’ à l’occasion de la même séance du Conseil Communal, au point précédent, Christophe COLLIGNON fit voter la création d’une Régie Foncière Autonome dotée d’un capital d’1.000.000 d’euros pour réaliser des opérations immobilières ainsi que des travaux dans les biens immobiliers appartenant à la Ville de Huy.
Cette même Régie fut ensuite utilisée pour acheter à prix fort d’autres immeubles à rénover. Cette curieuse pratique a mis en lumière l’étonnant contraste du Monopoly hutois (appelé par certains le MonopolHuy) qui consiste à vendre à des tiers privées des immeubles publics appartenant à la Ville de Huy pour ensuite en acheter d’autres qui sont à rénover avec des fonds publics.
Difficile ensuite de ne pas remarquer la lésion à l’intérêt général répondant à la règle : « Pile, le promoteur gagne, Face, la Ville perd ! ». Légitime donc de se demander comment la Ville de Huy a pu justifier de la nécessité de vendre la Maison Près la Tour pour montant symbolique en se retranchant derrière l’argument fallacieux de l’absence de moyens financiers nécessaires à la restauration.
Signalons au passage qu’il ressort par ailleurs des propos de Christophe COLLIGNON dans le PV du conseil que l’intérêt de la création de cette dernière était la possibilité de déduire la TVA et donc de réaliser des économies pour la Ville.
Force est de constater que presque 4 ans plus tard, la Régie Foncière ne s’est jamais immatriculée à la TVA, les documents de sa gestion ont été classé confidentiels et ses statuts n’ont pas été publié au Moniteur. Sans l’intervention de Cumuleo, la majorité des Administrateurs de la Régie Foncière Hutoise aurait probablement continué « d’oublier de déclarer ses mandats potentiellement rémunérés ». De quoi laisser présager d’un bel avenir pour cette structure opaque.
Conditions de la vente évoquant l’intérêt public
Dans le cadre de l’évaluation des offres, pour mettre fin aux inquiétudes du jury constitué par la Ville relativement à la vente de la Maison Près la Tour, deux principes furent intégrés au projet du future propriétaire : Le maintien d’une libre traversée des jardins publics et la création d’un espace culturel visant à justifier l’intérêt public de cette vente à 1 euro.
Est ensuite apparue la bizarrerie suivante : L’absolue nécessité de créer des petits espaces culturels (salles de petite jauge) pourtant situés à quelques dizaines de mètres de l’église Saint Mengold qui était déjà convertie en salle de spectacle. A l’époque, l’église désacralisée peinait d’ailleurs à trouver des occupants.
Autre élément remarquable qui cette fois démontre le non-respect des remarques du jury, l’amoindrissement progressif des contraintes d’accessibilité pour le public et relatives à la traversée des jardins ainsi qu’à l’accès aux futures nouveaux « espaces culturels ». A grand renfort de presse, la Ville de Huy diffuse des propos contraires à la réalité des actes et baux. Elle évoque notamment des contraintes qui ont été curieusement transformée en désidératas du propriétaire dans les projets soumis au vote. Une autre preuve emblématique de ces informations inexactes est la suppression dans la demande du permis de bâtir de l’escalier permettant de lier les différents niveaux de jardin. Comment pourrait-on ensuite traverser les jardins sans escalier ?
Conflits d’intérêts et finance publique
Pour répondre aux amateurs de bonnes affaires qui se poseront la question, l’acheteur ayant réalisé cette belle opération n’est autre que l’architecte Liégeois Pascal DUMONT du Cabinet p.HD. Dans son offre faite à la Ville, on pouvait lire un montant total des travaux estimé à 1.200.000 d’euros mais curieusement ce chiffre n’a jamais été détaillé. Il faut par ailleurs remarquer qu’un bien classé comme la Maison Près la Tour, du fait de son classement, pourra amener au propriétaire une participation publique de 100% des frais d’étude d’architecte et de 62% du montant des travaux (Région 60%, Province 1% et Ville de Huy 1%).
A nouveau en 2019, sans que la moindre ventilation soit pour autant fournie, la presse annonça un total des travaux revu à la hausse et estimé à 2.100.000 d’euros. Cette hausse faisant ainsi passer les frais d’étude réalisée par le Cabinet d’architecte de l’acheteur de 180.000 EUR à 315.000 EUR. Une belle opportunité pour le Cabinet p.HD dont le co-fondateur Paul HAUTECLERE avait fini par démissionné. Ca démission est intervenue après l’envoi par des riverains de recours contre la décision de vendre la Maison Près la Tour pour 1 euro symbolique. Difficile d’avoir des certitudes quant aux motifs de sa démission. Par ailleurs, le fait que la Commission Royale des Monuments Sites et Fouilles était amenée à statuer sur l’octroi d’un certificat de patrimoine, au demeurant condition de la vente de la M.P.L.T. au profit de l’associer de l’époque de Paul HAUTECLERE, plaçait ce dernier en situation de conflit d’intérêts en qualité de membre de la commission. Ce conflit d’intérêt fut d’ailleurs relevé par les riverains mais n’avait visiblement pas attiré l’attention du Collège hutois.
Perquisitions & Légèreté de la mise en concurrence
Le Collège hutois ne peut aujourd’hui ignorer les liens entre vente de Maison Près la Tour et l’affaire judiciaire de la vente de l’immeuble du Quadrilatère à 100 euros au profit de Hans DEDECKER (MR), fils de Jean Marie DEDECEKER (N-VA). Pour mémoire, les ventes du Quadrilatère ainsi que de la Maison Près la Tour donnèrent lieu début 2016 à des perquisitions entre autres à l’hôtel de Ville de Huy. C’est Paul FURLAN lui-même qui, confronté aux demandes de transparence administrative, fut contraint d’avouer que des pièces du dossier de la Maison Près la Tour étaient manquantes en raison des perquisitions.
Dans le but de justifier d’une mise en concurrence, un appel à projet fut organisé par la Ville. Hans DEDECKER fut étonnamment un des principaux concurrent de Pascal DUMONT. Dans le cadre de cette procédure de vente, seuls 3 candidats adressèrent une proposition avec architecte à la Ville de Huy. Le premier était Pascal DUMONT, le second Hans DEDECKER et le troisième un couple dont l’aléa des évolutions de carrière amena l’un des deux à être engagé par la structure parapublique MCH présidée par Christophe COLLIGNON. Eu égard à la quasi absence de publicité annonçant la mise en vente, les diverses qualités des intervenants ainsi que leurs proximités avec des membres du Collège ont toujours posé question.
Estimation du bien et transparence de la procédure
A l’époque, le cadre juridique entourant la vente de bien public était la circulaire Courard. Celle-ci prévoyait notamment que les estimations de biens et terrains devaient explicitement mentionner les références cadastrales des parcelles visées par l’estimation.
Dans le cas de la Maison Près la Tour, comble de mal chance, le notaire, qui fut désigné illégalement par le Collège, oublia d’indiquer les références des parcelles qu’il visait dans son estimation se limitant ainsi à estimer la « Maison Près la Tour » à 50.000-75.000 euros. Avait-il estimé uniquement le bâti ? Le bâti et son terrain ? Le bâti, son terrain et deux parcelles avoisinantes ? Impossible à dire sans obtenir le courrier de demande d’estimation qui, depuis 4 ans, est retenu illégalement par la Ville de Huy, et ce, au mépris de l’avis 107 de la CADA.
Malgré tout, le notaire conseilla au Collège de procéder à une mise en vente publique afin d’en tirer le meilleur prix et d’éventuellement ne pas vendre le bien dans le cas où le prix de vente obtenu serait insatisfaisant. Assez curieusement, le Collège décida de ne pas suivre les recommandations de l’expert qu’il avait pourtant désigné lui-même.
Dans le cadre de l’appel à projet relatif à la vente de la Maison Près la Tour, seules deux parcelles furent évoquées. Les parcelles B343h et B342t. De façon très surprenante, Pascal DUMONT, dans son projet, fut le seul candidat à intégrer deux autres parcelles appartenant à la Ville (B340a et B339e), non-estimées et qu’il finit pourtant par obtenir.
Jusqu’à ce jour, en dépit des nombreuses demandes de transparence lui ayant été adressée, la Ville de Huy n’a jamais daigné transmettre la copie du bail emphytéotique (document qui n’a d’ailleurs même pas été enregistré) et du compromis de vente signé avec Pascal DUMONT sans avoir été préalablement présenté au Conseil Communal.
Bref, il fallait en conclure que la Ville de Huy ne voulait pas agir dans transparence, qu’elle ne voulait pas obtenir le meilleur prix de vente ou encore étendre la publicité et que le patrimoine hutois était une sorte de super marché dans lequel les promoteurs pouvaient librement choisir les éléments à mettre dans leur panier d’achat.
L’étoufoire FURLAN : La Tutelle des Pompiers Locaux
Par voie de presse Christophe COLLIGNON, devenu bourgmestre, revendique aujourd’hui que la vente ne peut plus être annulée allant jusqu’à dire que :
C. COLLIGNON : « La tutelle a approuvé la formule » sic.
Le Président du Parlement Wallon par interim et député Bourgmestre ne peut cependant nier que c’est, sauf erreur, par expiation du délai d’exercice de la Tutelle (délai pourtant prorogé), que son ami personnel, le Ministre FURLAN avait fait fi de l’avis rendu par les plus hauts juristes de l’Administration Wallonne. Il n’est dès lors jamais ressorti du dossier que le Ministre FURLAN s’était engagé en validant la prise de décision, il avait par contre choisi de se mettre hors délai. (comprendrons ceux qui le surnommait « l’étouffoir »).
Dans son rapport de synthèse de 29 pages adressé au Ministre des Pouvoirs locaux de l’époque (Paul FURLAN), l’Administration Wallonne (DGO5) concluait à la nécessité d’annuler la décision de la Ville de Huy pour les motifs suivants :
DGO5 – Pouvoirs Locaux : « lésion à l’intérêt général » ; « violation des prescrits du CDLD » ; « violation du principe de bonne Administration »;
et relevait par ailleurs la désignation illégale du notaire chargé de l’estimation et de la vente ainsi que la violation de la loi sur les marchés publics.
Cette pratique du fait du prince s’asseyant sur l’avis technique des fonctionnaires Wallons pousse à s’interroger sur l’opportunité d’encore disposer d’une Administration. Ne serait-il pas plus simple et moins couteux, à l’instar de ce qu’à fait Paul FURLAN, de laisser décider le politique sans même tenir compte des textes de loi en vigueur ?
NOTE POUR LES AMIS DE LA TRANSPARENCE :
De manière constante de ce type de dossier de vente d’immeuble public pour montant symbolique conditionnée, on retrouve un mode opératoire commun que l’on nomme parfois « la technique des sauts de cliquets » ou encore de la « la technique de la roue à rochet » (anti-retour). Lorsqu’une évolution complète est impossible à justifier aux yeux du public, le politique la fragmente en plusieurs étapes et procède à des prises de décisions partielles successives sur lesquels personnes ne pourra revenir. De la sorte, tant durant le processus qu’après sa prise de fin, compte-tenu de la longueur de la procédure et de la multiplicité des étapes, les décideurs n’ont pas le recul nécessaire ou encore la capacité de comprendre quelles étaient les véritables intentions de départ et ce qu’ils ont fini par voter. Il n’est possible de comprendre ce genre de manœuvres qu’en demandant la copie intégrale du dossier de vente au nom de la législation applicable en matière de transparence administrative et en remontant le file des prise de décisions. Par chance, les autorités communales sont tenues à la motivation formelle des actes administratifs ce qui a pour effet de faire apparaitre ce lien entre les diverses décisions.
Sont tous véreux, malhonnêtes, profiteurs et nous les citoyens belges des merdes pour eux et des cochons payants, pas étonnant que la dette augmente et que nous sommes taxés au bénéfice des mafieux
Bravo pour toutes ces infos, et leur précision.
Merci à ceux qui fournissent ce travail.
A mettre entre toutes les mains citoyennes.
Qu’elles soient source de réflexion et de prise de conscience.
Changeons-nous d’abord. Pour l’avenir de nos enfants sur cette belle planète.
Bravo pour cette enquête. Par contre, si je peux me permettre, ça manque de relecture orthographique. Je me propose pour relire et corriger le prochain texte si vous voulez, ça fera plus sérieux.
Avec plaisir. La rédaction étant purement bénévole, il est difficile d’organiser une relecture professionnelle.
Bravo pour cette enquête